Près de 4 millions de salariés privés de droit syndical

Publié le par pc.duclos.cuers

C'est fait, Jean-François Coppé en tête  (président du groupe UMP), aux ordres du
patronat,  ampute la loi d'une avancée en matière de représentativité dans les TPE. 4 millions de salariés sont concernés. 
Parue dans l'Huma du 9 juillet 2010.

 

 

Le projet de loi sur le dialogue social dans les très petites entreprises est arrivé en débat à l’Assemblée nationale hier, amputé de son article 6 qui instituait un droit de représentation syndicale par la création de commissions paritaires.

C’est un feuilleton parlementaire de plus pour Éric Woerth. Le ministre du Travail a dû se résoudre à présenter hier soir un amendement contre une décision de son camp, dans le cadre de l’examen du projet de loi sur le dialogue social dans les très petites entreprises (TPE) à l’Assemblée nationale. Non que les désaccords soient si importants entre le gouvernement et sa majorité parlementaire, mais à l’heure où l’UMP serre les rangs pour sauver le poste du ministre en chef sur la réforme des retraites, il apparaît de mauvais goût de se diviser sur l’opportunité d’offrir aux salariés de TPE le droit à une représentation syndicale.

 

Réparer une injustice

Ce projet de loi est en fait un complément législatif à la loi du 20 août 2008, qui a profondément modifié les règles du dialogue social et de la représentativité syndicale, dorénavant fondée sur le vote des salariés. Pour les TPE, la loi du 20 août établit deux objectifs, liés entre eux : « renforcer l’effectivité de la représentation collective » des personnels et leur permettre de participer au vote de représentativité syndicale. Voilà qui promettait de réparer une injustice puisqu’en France, les entreprises de moins de 11 salariés n’ont aucune obligation légale de mettre en place des institutions représentatives du personnel, élection de délégués du personnel ou mise en place d’un comité d’entreprise. Plus de 4 millions de salariés, soit un quart de la population active, sont, de fait, privé de droit syndical dans leur entreprise et n’ont jamais l’occasion de participer à une élection professionnelle.

Qu’à cela ne tienne ! Les deux principales organisations patronales, le Medef et la Confédération générale des petites entreprise (CGPME), ont mené un lobbying d’enfer pour interdire aux syndicats de pousser la porte des petites entreprises. Avec des arguments dignes d’un antisyndicalisme primaire. Alors que 80% des contentieux prud’homaux concernent les TPE, Stéphan Brousse, président du comité TPE-PME du Medef, veut croire « qu’il n’existe pas de problème de dialogue social entre les salariés et les employeurs dans les très petites entreprises. Pourquoi vouloir rajouter des contraintes et de la bureaucratie ? » ose-t-il questionner. Quant à la CGPME, son président, Jean-François Roubaud, s’effraie de « voir s’immiscer au sein des TPE des personnes extérieures à l’entreprise » et considère que « là où règnent la franchise et le dialogue direct, on va introduire la suspicion et la bureaucratie ». En commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, ces organisations patronales ont fait ami-ami avec l’UMP au point que la majorité présidentielle, emmenée par son chef de file, Jean-François Copé, s’est autorisé à supprimer l’article 6 du projet de loi instituant la mise en place de commissions paritaires territoriales. Le Sénat avait déjà passablement raboté cette mesure en la rendant facultative, ce qui, selon Roland Muzeau, porte-parole des députés communistes, « constituait d’ores et déjà un scandale car cela signifiait que la liberté syndicale, droit fondamental censé constituer une contrepartie au droit de propriété et à la liberté d’entreprendre de l’employeur, ne pouvait s’exercer qu’avec l’accord… de l’employeur ».

 

L’esprit de la loi

Les députés communistes et socialistes ont donc, chacun de leur côté, redéposé des amendements pour tenter de réintroduire dans le texte un droit de négociation sociale pour les salariés des très petites entreprises. « Nous avons proposé de réintégrer l’article 6, avec des dispositions renforcées, notamment pour rendre obligatoire la création de commissions paritaires et favoriser leur implantation à tous les niveaux, local, départemental, régional et national », explique Roland Muzeau. De son côté, pour ne pas perdre la face et tenter de respecter l’esprit de la loi d’août 2008, Éric Woerth a présenté un amendement du gouvernement vidant encore un peu plus de leur contenu les commissions paritaires. Elles ne seraient plus chargées du « suivi de l’application des accords collectifs » mais n’auraient qu’une fonction de conseil. Même « light », il n’est pas sûr que l’article soit rétabli. Pas sûr en fait que le gouvernement en ait réellement envie. Selon Jean-François Copé, Nicolas Sarkozy a fait savoir que « c’est à l’Assemblée de trancher la question ». Le président du groupe UMP a pris ce message comme un feu vert pour continuer alors d’affirmer qu’il voterait contre cette disposition si elle était réintroduite dans le texte.

 

Paule Masson

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
B
<br /> Le syndicalisme est déjà très mal implanté dans les entrerpises, heureusement qu'il y a le public, avec de telles décisions le patronat a encore de beaux jours....Comment faire pour inverser la<br /> vapeur ?....<br /> <br /> <br />
Répondre